Javascript Menu by Deluxe-Menu.com fable Jean de La Fontaine : la tête et la queue du serpent
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Fable, Jean de La Fontaine, 
La Tête et la Queue du Serpent,  Livre VII, fable 17   
 

LA TETE ET LA QUEUE DU SERPENT

            Le Serpent a deux parties
            Du genre humain ennemies,
            Tête et Queue ; et toutes deux
            Ont acquis un nom fameux (1)
            Auprès des Parques cruelles : (2)
            Si bien qu'autrefois entre elles
            Il survint de grands débats
                         Pour le pas. (3)
La Tête avait toujours marché devant la Queue.
            La Queue au Ciel se plaignit,
                         Et lui dit :
            Je fais mainte et mainte lieue,
            Comme il plaît à celle-ci.
Croit-elle que toujours j'en veuille user ainsi ?
            Je suis son humble servante.(4)
            On m'a faite, Dieu merci,
            Sa soeur, et non sa suivante.
            Toutes deux de même sang,
            Traitez-nous de même sorte :
            Aussi bien qu'elle je porte
            Un poison prompt et puissant.
            Enfin voilà ma requête :
            C'est à vous de commander,
            Qu'on me laisse précéder
            A mon tour ma soeur la Tête.
            Je la conduirai si bien,
            Qu'on ne se plaindra de rien.
Le Ciel eut pour ces voeux une bonté cruelle.
Souvent sa complaisance a de méchants effets.
Il devrait être sourd aux aveugles souhaits.
Il ne le fut pas lors : et la guide nouvelle,
             Qui ne voyait au grand jour
             Pas plus clair que dans un four,
             Donnait tantôt contre un marbre,
             Contre un passant, contre un arbre.
Droit aux ondes du Styx elle mena sa soeur.
Malheureux les Etats tombés dans son erreur. (5)

Source : Esope La queue et le corps du serpent

(1) une renommée
(2) Les Parques sont les divinités latines du destin ... et de la mort (Nona, Décima et Morta)
Tête et queue du serpent contribuent à tuer (au 17ème siècle, on croyait que le venin était formé dans la queue et remontait jusqu'aux dents.) in cauda venenum
(3) pour la préséance, le protocole...
(4) façon ironique de dire "je m'y refuse"
(5) la puissance laissée à ceux qui ne sont faits que pour obéir conduit à la ruine.

 

 

 

 


Illustration de J.J. Grandville (1803-1847)
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